Azra H. V. 06/06/2016

Dans les magasins, j’étouffe

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Une société qui pousse le consommateur à choisir entre 200 brosses à dents. C'est, en partie, ce qui pousse Azra, 25 ans, à détester faire ses courses. Et vous, vous sentez-vous oppressés par l'ambiance des centres commerciaux ?

J’ai pris mon indépendance assez jeune, j’avais 19 ans. Ce n’était ni par contrainte ni par obligation, mais par choix et par envie. L’une des premières choses que j’ai faite avec fierté a été d’aller faire les courses. Je me suis sentie fière de faire mes propres achats : pouvoir choisir et acheter ce que je souhaitais avec mon propre argent.

Comme l’impression d’être prise pour une conne

Quelques années plus tard, s’il existe bien une chose que je déteste, c’est faire les courses justement !

Je me sens mal, de plus en plus mal dans les magasins. Je fuis les hypermarchés, les grandes surfaces, les centres commerciaux comme la peste, le choléra ou la tuberculose.

Et pourtant, je suis contrainte d’y passer du temps, du temps que je chronomètre de plus en plus pour me défier personnellement d’y rester le moins possible. De toute façon, ça se finit toujours de la même manière : je pleure une fois que le montant s’affiche sur la caisse en regardant mon sac de courses à moitié vide (ou à moitié plein selon le point de vue).

Je me sens mal dans les magasins comme si je manquais d’oxygène, de liberté : j’étouffe !

Je m’y sens seule, je m’y sens perdue, je m’y sens envahie, je m’y sens agressée, je m’y sens prise pour une conne.  Pas vous ?

Je passe à chaque fois plusieurs minutes à trouver le bon rayon. Ce n’est pas le pire. Non, le pire est de se retrouver devant un panel monstrueux d’un seul et même produit décliné de couleurs, de tailles, de parfums, de composés, de marques, de prix différents. C’est une véritable agression visuelle et intellectuelle…

Entre 200 modèles, quelle brosse à dents choisir ?!

Prenons le cas d’un achat que je considère indispensable : une brosse à dents. Je vais dans un magasin car j’ai besoin d’une brosse à dents. Une brosse à dents que je vais devoir choisir parmi 10 à 200 autres modèles. Je regarde les prix, je regarde les lots, je regarde l’emballage, je regarde la couleur… que dois-je regarder finalement ? Peut-être que mon problème est lié au fait que je ne sais pas choisir ! C’est vrai, je ne sais pas choisir car je ne comprends pas la variété de choix que nous avons pour la plupart des produits. Pourquoi existe-t-il autant de brosses à dents différentes ?

Je me suis amusée à regarder les autres clients. Ils choisissent en fonction de la marque, de la couleur, du prix ou bien la brosse à dents la plus proche d’eux au moment où ils passent. Personnellement, je n’ai pas encore trouvé mon critère pour choisir car même si je me tourne vers les prix les plus bas, je reste face à une variété de cinquante brosses à dents différentes pour le même prix, à quelques centimes près. Et si ce n’était que pour ça à la limite…

Je perds mon temps dans les magasins

Je passe indéniablement du temps à choisir certains produits pour éviter de me faire avoir face à des offres de plus en plus nombreuses, de plus en plus douteuses. Au final, je perds toujours mon pari face au chronomètre. Je perds mon temps dans les magasins et j’en souffre véritablement.

Si seulement l’ambiance pouvait apaiser mon état d’esprit, ça l’aggrave ! Il existe deux catégories de gens dans les grandes surfaces. Ceux pour qui faire les courses est devenu une sortie hebdomadaire agréable et ceux pour qui c’est une contrainte. Se retrouver écraser entre ceux qui poussent leur caddie de manière lente et spacieuse et ceux qui slaloment avec vitesse et maladresse dans les rayons, est désagréable. Dans les deux cas, les gens ne font pas attention aux autres. Dans le lieu qui représente notre société de consommation par excellence, les comportements sont des plus individualistes. Je n’y suis pas à ma place.

J’y vais de moins en moins mais je ne peux éviter d’y aller complétement. Je me rappelle qu’étant gamine, j’adorais aller dans les hypermarchés. Plus ils étaient grands, plus c’était éblouissant. Aujourd’hui, plus ils le sont, plus c’est étouffant. Faire les courses est devenu quelque chose de normal, banal, anodin au quotidien. Pour ma part, c’est une vraie corvée. J’ose espérer que vous y penserez la prochaine fois que irez acheter une brosse à dents ! Laquelle prendrez-vous ?

 

Azra, 25 ans, volontaire en service civique, Metz

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2 réactions

  1. Pas besoin de tout cramer, je pense que ça serait contre-productif ! Par contre, penser autrement sa consommation, envisager différemment ses besoins avec intelligence et respect (des autres, de la nature et surtout d’abord de soi-même), changer sa manière de dépenser et de vivre… ça peut se provoquer, ça peut s’éduquer !. Mais encore faut-il que les gens en prennent conscience et le comprennent. Non, nous n’avons pas besoin de tout ça ! Mais malheureusement, nous en avons tous les jours, toujours plus… pour quelle raison ? Et surtout, pour quoi faire ? Finalement, nous consommons sans réfléchir par manque de temps, de réflexion ou par simple flemme. Et tant que les consommateurs ne changeront pas leur manière de consommer, l’offre de la consommation continuera à s’élargir, continuera à nous étouffer ! Garde tes forces pour éclairer les esprits car c’est tous ensemble que nous pourrons envisager une autre manière de consommer !

  2. qu’est-ce qu »ils sont moches ces temples de la consommation !
    combien j’enrage à être un de ces consommateurs de plus à devoir attendre à la queue la réalisation de la transaction qui me donne le droit de survivre pendant que la musique de supermarché distrait les regards fatigués alentour ! l’univers me rit au nez, la culture marchande me postillonne à la tronche sa puissance bienveillante, c’est immonde d’avoir besoin de ça dans la vie : bip, bip ça scanne ça passe et tout se vaut, juste quelques chiffres dans le grand chiffre d’affaire, et à peine une formule de politesse pour le ou la caissière…
    mais demain ça va changer.
    demain, je chouraverai tout et s’ils m’en empêchent, je ferai tout cramer. avec amour

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