Hawa N. 15/01/2015

Terrorisme : pourquoi ne pas soigner les vraies causes !

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Le 7 Janvier 2015, des terroristes attaquent Charlie Hebdo. La France accuse, choquée, le coup de cette violence. Et les jeunes ils en pensent quoi ? Série de témoignages.

Dimanche 11 janvier 2015, près de 4 millions de personnes ont défilé en France suite aux attaques du journal satirique Charlie Hebdo. J’observais depuis ma télé cet énorme flux humain occuper la place de la République en brandissant des pancartes qui disaient non au terrorisme, à la censure, à la violence et appelaient à l’unité, à l’amour et à la paix.

C’était beau de voir des personnes marcher main dans la main peu importe la couleur de peau, les origines, la religion et qui, les coudes serrés faisaient ainsi front à la violence. Oui c’était beau.

Comme un pansement sur une plaie béante

Puis mon coeur a fait un tour. Lorsque j’ai vu des dirigeants qui avaient du sang sur les mains se joindre à la marche pour la liberté d’expression, je n’ai pas compris cette contradiction. Quelques jours plus tard, des amis qui ont participé à la marche ont fini par me convaincre qu’au delà des invités indésirables, ce n’était pas sur eux qu’il fallait se focaliser mais plutôt sur les manifestants, sur le peuple. Car cette volonté d’unité et de solidarité, ce sont les gens comme vous et moi qui la portons. Une volonté accompagnée d’une profonde envie de trouver des solutions face aux problématiques qui touchent notre chère société.

Pourtant en lisant les infos ces derniers jours, je me suis aperçue en étudiant les solutions proposées par le gouvernement que nous ne sommes pas sur la même longueur d’onde.  Les politiques tentent tant bien que mal de nous montrer qu’ils comptent lutter à bras-le-corps contre la montée du terrorisme. Pour cela, on nous sort les mots «défense», «sécurité» et leurs synonymes à toutes les sauces. On nous fait de grands discours sur le durcissement des sanctions appliquées aux aspirants terroristes (allant même jusqu’à évoquer un éventuel Patriot Act à la française, qui on peut le rappeler est une loi qui autorise notamment les services de sécurité à surveiller les communications sur Internet et à effectuer des écoutes téléphoniques. Elle leur permet aussi d’accéder aux données informatiques sans autorisation préalable ni besoin de justifier qu’elles aient un quelconque rapport avec une enquête terroriste, et sans en informer les utilisateurs. Une sorte de Big Brother quoi.

Et enfin cerise sur le gâteau, on propose un renforcement des services de renseignement #M. Valls (et vas y que je te mange un peu plus de liberté au passage). Voilà comment les politiques répondent à la question du «Et après ?».  Ils n’ont de toute évidence toujours rien compris. On se contente encore une fois de masquer les symptômes d’une France qui va mal sans tenter d’en soigner les causes. C’est comme poser un pansement sur une plaie béante, ça ne sert à rien.

Retour à la réalité : le chômage, l’isolement, l’exclusion…

Ils sont pourtant nombreux, depuis cette affaire, ces anonymes qui à travers les réseaux sociaux livrent leur avis sur cet évènement. C’est sur ces mêmes réseaux que j’ai pu voir des avis éclairés sur la question du «comment en est-on arrivé là ?». Comment des jeunes qui sont nés en France peuvent-ils en arriver à commettre des crimes dans leur propre pays ? Blâmer l’Islamisme radical n’est pas la réponse à la question. Pourquoi ne pas chercher à comprendre les causes plutôt que de se pencher uniquement sur les conséquences ?

Il y a ces problèmes qu’on ne voit pas, ou plutôt qu’on fait semblant de ne pas voir. Quand Manuel Valls parle de renforcer les services de renseignements, je ne comprends pas. On n’est pas dans un film, pourquoi ne pas revenir à la réalité ?

La réalité elle se trouve juste au pas de la porte, au bas des immeubles, chez ces jeunes qui ont quitté si tôt l’école qui ne leur donne pas toujours leur chance. Certains ont troqué leurs crayons pour des joints, préfèrent l’argent facile plutôt que de pointer à Pôle Emploi. La réalité est aussi chez tous ces jeunes qui ont arrêté leurs études supérieures faute de moyens, qui cumulent des petits boulots plutôt que de réviser des partiels. La réalité est également chez ces jeunes surdiplômés qui se sentent trahis. Ils ont rempli leur part du contrat mais l’Etat leur a menti. On leur promettait du boulot à la sortie et les voilà au chômage ou cumulant des stages sans suite. Aux problèmes économiques s’ajoutent la montée du racisme et de la xénophobie, l’islamophobie et l’antisémitisme. Isolement, exclusion, sentiment d’inutilité, autant de maux qui témoignent d’un malaise social qui touche toutes les couches de la population.

On nous propose de mobiliser plus de forces de Police mais quel est l’intérêt ? En 2015, on trouve toujours des tags «nik la police» redécorer les murs d’immeubles et les rames de métro. Pourquoi ne pas plutôt chercher à comprendre les causes des rapports conflictuels entre les forces de l’ordre et les jeunes ? C’est comme s’il n’y avait plus de dialogue, qu’on privilégiait la sanction à la discussion.

Avant d’assister à des sommets mondiaux contre le terrorisme, il faut commencer par soigner les maux du peuple. On aimerait des propositions concrètes qui concernent nos vrais problèmes (montée du chômage, xénophobie, racisme, isolement). Ainsi, peut-être que nous arriverons à construire un véritable sentiment d’unité.

 

Hawa, 22 ans, volontaire en service civique, Ile de France

 

Crédit Photo CC Frédéric de la Mure // Flickr

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1 réaction

  1. Trop bien l’article, et tu dis des paroles justes, ou du moins avec lesquelles je suis d’accord. 🙂

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