Amir 17/05/2020

En France, je peux enfin vivre mon homosexualité

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Au Maroc, parce que je suis homosexuel, j’ai été moqué, insulté, violenté. Alors j’ai fui pour trouver un pays qui accepte les LGBT, tels qu'ils et elles sont.

Porter des vêtements « girly », des salopettes ou des mini shorts avec des talons, mettre des bagues ou me faire un make-up… En France, je ne suis pas obligé de jouer le rôle de l’homosexuel discret.

Depuis que je suis arrivé le 28 janvier 2020, je me sens libre d’être moi-même. Je me sens libre de faire apparaître ma personnalité dans mes vêtements ou dans mes accessoires. Ici, je peux aller à des soirées ou à des fêtes avec mes amis homosexuels, je peux sortir librement avec mes « sex friends » ou mon « boyfriend » dans n’importe quel endroit sans que personne ne me dise rien.

Tous les week-ends, je vais dans le Marais. Ce que j’aime là-bas, c’est qu’il y a tous les LGBT de Paris, alors je me sens à ma place. Je me balade, je vais dans des bars… Je ne me sens pas isolé ou différent des autres. Là-bas, personne ne me regarde mal ou ne me dit des choses déplacées. 

Ici, la loi protège la communauté LGBT

D’accord, il y a des homophobes en France. J’en ai d’ailleurs rencontré à la Croix-Rouge. Ils m’ont insulté et menacé. Mais ici, la loi me protège. Avant d’arriver en France, j’ai cherché sur internet quels étaient les pays européens qui protègent le plus les homosexuels. J’ai contacté des associations de LGBT en Allemagne et en Belgique, mais elles n’ont pas accepté de m’aider à quitter mon pays. Alors j’ai choisi la France pour m’accueillir. 

L’homosexualité est encore condamnée dans de nombreux pays . Dans certains, on en meurt. En 2017, Le Monde faisait un point sur l’homophobie à l’international.

 

Parce qu’à Tanger, au Maroc, je n’étais pas libre d’être moi-même. Depuis que je suis petit, que je sors avec ma mère dans la rue, je connais ma sexualité : c’est les mecs que je regarde. À cause de ça, j’ai passé toute ma scolarité isolé des autres. Au collège surtout. Ceux de ma classe se moquaient de mon style vestimentaire européen et américain, de ma façon de parler, de mon caractère doux, gentil et affectueux.  

« Regardez cet efféminé »

Parfois même ils me poussaient, ils me frappaient et m’insultaient. Ils disaient : « Regardez cet efféminé, il ressemble à une fille. » Et ils venaient derrière moi pour me toucher avant de s’enfuir. Dans la cour de récré, j’étais tout seul dans mon coin. Je restais seulement avec les filles mais parmi elles, certaines se moquaient de moi. Elles me disaient qu’elles étaient plus viriles que moi. 

En 2017, ma sœur m’a poussé à m’inscrire dans une association de cultures japonaise et coréenne qui s’appelle « Dragon Tanger », pour que je rencontre des gens ouverts d’esprit et que j’arrête de passer mon temps tout seul chez moi. Ils organisaient des événements autour des mangas ou de la culture japonaise. J’ai rencontré un groupe de danse coréen, je me suis mis à sortir avec eux. 

On se baladait, on allait au McDo de la ville. Avec eux, je me sentais bien, je pouvais être moi-même. Il y avait d’autres homosexuels, d’autres personnes LGBT. J’ai même rencontré le mec avec lequel j’ai fait ma première fois. Avec mon groupe, on restait différents des autres Marocains. Les gens dans la rue nous regardaient bizarrement : ils n’acceptaient pas qu’on porte des boucles d’oreilles, des colliers, des vêtements extravagants ou rock and roll…

Ce soir-là, ça a été l’enfer…

Ma famille n’a jamais accepté ce nouveau groupe d’amis. Quand j’ai commencé à pratiquer la danse avec eux, ils m’ont rejeté et critiqué. Ils me rabaissaient tout le temps. Chaque fois que je sortais avec eux, ils me surveillaient. Ils me disaient : « Si je te trouve avec ce groupe, tu vas être puni. » 

Un jour, en été, mon grand frère a pris mon téléphone et il a commencé à lire toutes mes conversations, il a vu toutes mes photos efféminées. Ce soir-là, ça a été l’enfer. Il m’a frappé avec violence. Il était sauvage, et m’a rasé les cheveux, m’a frappé encore et encore.

Après un an et demi de tortures, de malédictions, de punitions, de privations et de sévères passages à tabac, j’ai pu ressortir avec mes amis à nouveau. Mais malheureusement, quand ma famille a arrêté d’être violente avec moi, ce sont les gens dans la rue qui ont commencé à m’agresser, parce que ça se voyait à mon style que j’étais homosexuel. 

Arthur est hétéro et pourtant il va se rendre compte de l’enfer que peuvent vivre les LGBT. Parce qu’il a dormi chez un ami homosexuel une nuit, des rumeurs ont commencé à circuler dans le lycée

C’était risqué car au Maroc, l’homosexualité est punie par la loi. On peut prendre jusqu’à trois ans de prison. Donc j’ai commencé à en parler avec ma mère et mes amis qui m’ont conseillé de quitter le territoire. Je l’ai dit à ma famille. Ma mère voulait partir avec moi, mais elle n’a pas pu. Donc je suis parti tout seul pour la France le 28 janvier. Maintenant, je ne me sens plus isolé ou différent comme au Maroc. J’ai rencontré des gens qui m’ont aidé, par exemple une bénévole dans un centre LGBT. Je me suis fait des amis, des jeunes LGBT. Ici, je vais pouvoir trouver le vrai amour mais surtout, je vais pouvoir le vivre. 

 

Amir, 16 ans, en formation, Paris 

Crédit photo Pexels // CC Jean-Baptiste Burbaud

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1 réaction

  1. S’éloigner de toute sa famille a 16 ans doit être difficile mais malheureusement les autres lgbt dans les pays répressifs envers les lgbt n aurons peut être pas sa chance

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