Andreea C. 01/08/2017

J’ai travaillé 2 220 heures à côté de mes études

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Au nom de tous les étudiants qui travaillent à côté de leurs études, fatigués par la vie, avant même de l'avoir commencée, je m'adresse à vous, candidats à la présidentielle : quelles propositions avez-vous à nous faire ? 

Je me présente : Andreea Camen, 21 ans, assistante d’éducation dans un collège tranquille d’un petit village d’Alsace.

J’ai effectué mon service civique en 2014-2015 à l’AFEV, après y avoir été bénévole un an. Je suis également contributrice pour la ZEP, animatrice au Souffle 9, une association qui organise des séjours et week-ends pour des jeunes en situation de handicap mental, et lauréate de l’Institut de l’Engagement.

J’ai aussi eu la chance de travailler sur le Tour de France, chez  l’Oréal et comme assistante pédagogique dans un collège classé REP+ à Nanterre.

« Mais pourquoi elle nous raconte tout ça ? »

Parce que j’adore raconter ma vie, mais aussi et surtout parce que ce que vous ne savez pas encore, c’est que je suis étudiante.

L’impression de mener une double vie

Je me présente : Andreea Camen, 21 ans, étudiante en master en droit social, interne, européen et international à l’Université de Strasbourg, après avoir fait ma licence à Nanterre (Université Paris X).

Malgré toutes les bonnes choses que mes diverses expériences m’ont apporté, j’ai énormément souffert de ne pas avoir cet immense luxe de me consacrer exclusivement à mes études.

Je me suis « amusée » à prendre tous mes contrats de travail pour vous donner une idée « concrète » de la masse de travail fournie en parallèle.

En quatre ans d’études, je compte dix employeurs différents et au total, j’ai fourni environ 2220 heures de travail.

Et encore, je ne compte pas mon emploi actuel : je travaille 30 heures par semaine en parallèle de mon M2.

Avec ce texte, je ne cherche pas à me plaindre, mais je voulais témoigner de mon expérience… et de ma fatigue. Parce que, quand ça ne va pas, je me demande pourquoi je fais tout ça.

A quoi bon s’user à 20 ans pour pouvoir étudier dans des conditions décentes si on n’a pas la sécurité de l’emploi derrière ?

Il est difficile de rester sur le chemin des études quand, tous les jours, on ne cesse de nous rappeler qu’on risque d’être abonnés à Pôle Emploi à l’issue de toutes ces années sacrifiées à être formés en vue d’un poste meilleur que celui qu’on aurait pu obtenir tout de suite après le bac.

Alarmer la classe politique

Malgré les interrogations et les frustrations, j’ai tout de même réussi à obtenir ma licence. Je fais un master intéressant, je me sens proche des problématiques sociales abordées et malgré le fait que je ne sache toujours pas ce que je vais devenir, je suis bien comme je suis pour l’instant.

Mais tout le monde n’a pas cette chance.

Parce que la bourse ne suffit pas quand on veut vivre bien, ou tout simplement ne pas dormir dans un 9m², on se sent obligés de travailler à côté, parce qu’on n’en peut plus d’être pauvre et frustré quand on veut s’acheter un truc et qu’on ne peut pas parce qu’on est vite hors-budget.

Être pauvre, ce n’est pas que manger des pâtes et se faire harceler par son banquier.

Être pauvre, c’est aussi manquer de confiance en soi.

Être pauvre, c’est s’isoler.
Être pauvre, c’est la dépression.
Être pauvre, c’est aussi être en mauvaise santé.
Parce que parfois, on est tellement pauvre, que lorsqu’il faut faire le choix entre manger et aller chez le médecin, c’est vite fait : on va manger.
Alors j’aimerais, aujourd’hui, alarmer la classe politique.
Lui demander de se pencher sur nos problématiques et nous offrir de réelles solutions pour nous permettre de faire des études dans des conditions décentes.

 

Andreea Camen, 21 ans, étudiante, Strasbourg

Crédit photo Flickr // CC Retis, Aurélie Pedron

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