Axelle 21/04/2017

J-3 et je ne sais toujours pas pour qui voter

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J'ai 25 ans et comme beaucoup à l'approche de l'élection présidentielle, je ne sais pas pour qui voter. Loin de se désintéresser de la politique, j'ai décidé d'aller à la rencontre de certains partis.

J’ai 25 ans, j’ai envie de voter, mais je ne sais pas pour qui. Les premières images qui me viennent quand on me parle d’hommes et femmes politiques, c’est d’abord celles de menteurs, de menteuses.

Alors j’ai décidé, de me renseigner. J’ai regardé les débats, devant lesquels je me suis endormie, mais j’ai aussi cherché à frapper directement à la porte de certains partis…

Ma visite au FN… troublante

Jeudi 26 janvier. Je me rends sans rendez-vous dans un local du FN où deux militants acceptent de me recevoir. Je suis très bien accueillie. Je n’ai pas pu m’empêcher de remarquer dans le couloir la vitrine remplit de « goodies », en particulier la petite casquette avec le tristement célèbre slogan « La France aux Français », ainsi qu’une bouteille de rosé avec une photo de Marine Le Pen.

J’entame la discussion en expliquant que je suis « politiquement » perdue et que je cherche à avoir des renseignements sur leurs ambitions politiques afin de me faire ma propre idée.

On me demande de quel parti politique je me rapproche le plus, ce à quoi je réponds : « Aucun réellement, il y a des bonnes et des mauvaises idées dans chaque parti. » Nous discutons et de fil en aiguille, nous en arrivons au « Mariage pour tous », qui représente pour moi l’une des meilleures choses que le quinquennat de Monsieur Hollande ait apporté à la France. Je campe sur mes positions et mon interlocuteur sur les siennes. Pour lui, le PACS aurait dû être amélioré et le « Mariage pour tous » non adopté. D’après lui, le mariage est l’union de deux personnes de sexe différent. Je lui réponds que pour moi, le mariage est l’union de deux personnes qui s’aiment, ce à quoi il me répond : « Je n’ai pas de problème avec ça, j’ai un très bon couple d’amis gay », qui me rappelle le « J’ai un très bon ami noir » quand on suspecte quelqu’un d’être quelque peu raciste.

Nous poursuivons sur le débat des migrants qui fait rage en ce moment. Je ne manque pas de préciser que ces gens fuient la guerre comme mon grand-père l’a fait pendant la Seconde Guerre Mondiale en fuyant l’Italie et que ma mère, bien que Française, est née à Casablanca. On me répond alors que c’est différent, puisqu’il s’agit d’un pays de l’Union européenne et que ces pays partagent une même « culture » portée par le catholicisme, que les migrants d’aujourd’hui sont très différents en comparaison à ceux d’Espagne qui arrivaient avec seulement quelques affaires tirées par un âne et que les migrants d’aujourd’hui arrivent avec des smartphones. Il ajoute qu’un journaliste allemand s’était « infiltré » dans un groupe d’immigrés et qu’il avait constaté de nombreux abandons de sacs de nourriture fournis par les ONG au bord de la route.

On me « bombarde » d’affirmations au sujet des immigrés. On me dit que la plupart ne fuient pas la guerre mais cherchent uniquement à profiter des prestations sociales qu’offre la France et que certains immigrés de longue date « falsifient » des fiches de paie afin de toucher une retraite plus importante.

A ce moment-là, je me demande comment ce genre d’info a pu m’échapper. Je suis à la fois méfiante, mais aussi dans le doute. Je sors de ce rendez-vous « troublant » et je fais un débriefing avec mes amis, qui me rassurent en m’expliquant que la force du FN est de jouer sur les mots et de manipuler l’information en intox pour rallier les voix des personnes qui ne vérifient pas les sources. Bref, ce parti politique ne me correspond pas. Je le savais déjà mais là, au moins, je peux clairement répondre pourquoi.

Mes coups de fils aux Républicains… vains

Lundi 20 mars. J’appelle le QG des Républicains de ma ville pour essayer d’avoir un rendez-vous ou un entretien téléphonique, même rapide… pas de réponse. J’essaye dans d’autres villes. Au bout du 4ème essai, on me répond enfin. Je tombe alors sur une candidate aux législatives. Je lui explique ma problématique, malgré le fait qu’au fond de moi, je sais pertinemment que je ne voterai pas pour son candidat surtout après toutes ces affaires… Je souhaite juste écouter ses arguments. Elle me dit de regarder le débat du soir, que je me ferai ma propre idée comme ça. Conversation top chrono : une minute vingt-deux. Merci Madame ! Je continue en appelant le QG des Républicains à Paris. On me répond et on me redirige vers le QG de campagne de Monsieur Fillon. Six appels, aucune réponse. Sans doute trop occupés à gérer la crise de sa mise en examen, faisant suite aux soupçons d’emplois fictifs de son épouse et de ses deux enfants.

Ma discussion avec un militant PS… stimulante

Mardi 28 mars. J’ai rendez-vous avec un jeune militant du PS qui est étudiant pour qu’il m’explique le programme de Monsieur Hamon. Il me présente le programme et me donne son point de vue sur ce qui lui semble être les meilleures idées de son candidat. La première : le revenu universel, mesure phare du candidat, projet qui me semble complexe à financer. Il m’explique que Monsieur Hamon est bien entouré dans sa campagne par Monsieur Piketty par exemple – un économiste français ayant remporté plusieurs prix dans son domaine -, et que le projet n’est pas utopiste mais réalisable. Pour ma part, je trouve l’idée intéressante particulièrement pour les étudiants qui n’arrivent pas joindre les deux bouts, mais aussi les familles dont les fins de mois sont difficiles.

De fil en aiguille nous arrivons à débattre sur l’écologie, nous parlons des perturbateurs endocriniens. Il m’explique qu’il est le seul candidat à vraiment se soucier de cela, avec une vrai politique écologique et qu’il a le ralliement de Monsieur Jadot, homme politique et militant écologiste.

Par la suite, nous discutons de l’idée d’un 49.3 citoyen, que je trouve géniale, de la reconnaissance du vote blanc, que je trouve indispensable, du droit de vote aux étrangers, que je trouve légitime.

Bref, durant une heure, il a eu la patience de m’expliquer tout cela et de répondre à mes questions sans jamais essayer à tout pris d’obtenir ma « voix », un geste désintéressé que j’apprécie. A la fin de notre discussion, il me propose, si je le souhaite, d’assister à l’une de leur réunion et m’indique qu’il met en place un bus pour se rendre à l’un des meetings de Monsieur Hamon. Le projet de Monsieur Hamon est-il vraiment trop idéaliste et utopiste comme le pense mon ami qui va voter pour Monsieur Macron ? Les idées me plaisent mais j’attends de voir plus… si Monsieur Mélenchon ne se rallie pas à Monsieur Hamon a-t-il une chance ? Rien n’est encore joué, d’après les chiffres nous sommes 43 % d’indécis.

 

Aujourd’hui, à quelques jours de l’élection présidentielle, je ne suis plus aussi perdue qu’au début, mais cette campagne me conforte dans l’idée que je me fais d’un politique, à savoir celle d’un menteur. Toutes ces affaires judiciaires ont pourri le vrai débat, celui dont j’avais besoin pour me décider. Alors je vais aller voter, c’est sûr, mais en me demandant : « Dois-je voter pour le moins pire ? Dois-je voter pour l’un pour faire barrage à l’autre ? Dois-je voter pour celui qui ne gagnera certainement pas mais avec qui je partage des idées ? Ou dois-je voter blanc ? »

 

Axelle, 25 ans, jeune diplômée, Montpellier

Crédit photo © H2Woah! 

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