Marion N. 05/05/2020

Confinement : mon concours de médecine est en péril

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Entre la 3500ème et la 5000ème place, il n’y a même pas un point d’écart à mon concours de médecine. Et malgré le stress du confinement, mon avenir en dépend.

Cette année, je passe l’ECN au CHU de Besançon, le concours national à la fin de la sixième année d’études de médecine. Ça fait six ans qu’on travaille pour choisir ce qu’on veut faire. Alors forcément, le confinement remet beaucoup de choses en question.

Le concours, c’est pour choisir notre spécialité et notre ville pour l’internat. Tous ceux qui l’ont auront un poste. Seulement, si tu es dans les 1000 derniers, tu peux te retrouver avec une spécialité et une ville que tu n’as pas souhaitées. Sachant que c’est ta spécialité pour le reste de ta carrière, ça a un énorme impact… Alors, en ce moment, ça fait peur parce qu’on se retrouve complètement déstabilisés, dans l’incertitude sur les dates et le déroulement des épreuves. Ça joue aussi sur le moral. Est-ce qu’on va tenir jusqu’à cet été ? Et est-ce que les épreuves auront vraiment lieu en juillet ?

Ça peut se jouer à trois questions !

C’est difficile de voir nos habitudes et notre rythme chamboulés, si proche du concours. Depuis le mois de septembre, on avait une vie bien régulière : BU de 8h30 à 12h30, puis on mange au RU et on se remet au boulot de 14h à 19h30. Avec le confinement, on n’a plus les horaires de la BU pour nous donner ce rythme. Il faut aussi se faire à manger et ça prend plus de temps. Et puis sans voir ses amis, ça change moins les idées. On peut moins se défouler en allant courir, moins décompresser…

Tout ça a forcément un impact sur la qualité de notre travail. J’ai quand même la chance d’être confinée avec mon copain qui passe le concours aussi, donc on arrive à se motiver ensemble mais on n’est pas des robots. On est moins concentrés et moins motivés, on est préoccupés par la situation. J’ai peur que ça ait un impact sur mes capacités au concours le jour J.

Le concours de médecine n’est pas le seul à avoir été affecté par le confinement. Tous les concours du supérieur ont dû s’adapter. Marianne a fait un tour d’horizon :

 

C’est difficile de s’imaginer avorter tout ça pour finalement ne pas réussir à obtenir le métier ou la ville que je souhaite. Entre la 3500ème place et la 5000ème, il n’y a même pas un point d’écart. Ça peut se jouer à trois questions ! Il y a la possibilité de demander un redoublement, mais c’est sur dossier et il faut faire cette demande assez rapidement. C’est compliqué de se dire : « Est-ce que je me vois recommencer une année comme ça de stress et de travail ? »

Je sais que c’est ce métier que je veux faire

Il y a eu une période compliquée pour moi en fin de troisième année où je n’étais plus sûre de ma vocation. Tous ces sacrifices, ce travail… À quoi bon ? Il m’est arrivé de ne pas pouvoir partir en vacances avec ma famille ou de fêter Noël car on avait des partiels début janvier. On a tellement la tête dans le guidon que, parfois, on ne prend pas le temps de se demander les raisons qui nous motivent. C’est dans les moments de crise qu’on peut se recentrer sur les valeurs qui nous ont poussés à choisir cette filière. Et quand on voit la situation actuelle, je sais que c’est ce métier que je veux faire.

Depuis toujours, j’ai envie d’être pédiatre. C’est demandé à peu près au milieu du classement, donc il faut travailler mais c’est pas non plus dans les 1000 premières places. Ça m’enlève une certaine pression de me dire que ce n’est pas inaccessible. On a eu les résultats fin mars du concours blanc et j’ai été classée dans la première moitié. Ça m’a redonné un peu de motivation pour continuer à bosser jusqu’à début juillet.

Le désavantage des réquisitionnés

Et je m’estime chanceuse : je suis à Besançon, on n’a pas été réquisitionnés à l’hôpital. Ça a été un choix de la part de notre doyen de mettre le minimum d’étudiants au contact des patients pour éviter la propagation du virus. J’ai été soulagée. Cette année, on se donne à fond pour le concours, et j’aurais eu du mal à gérer le stage à l’hôpital, et bosser en rentrant le soir. C’est culpabilisant aussi. On sait que c’est hyper tendu à l’hôpital et on aimerait pouvoir aider. Mais c’est clairement un désavantage pour ceux qui sont réquisitionnés.

Le confinement met à l’épreuve beaucoup d’examens officiels, dont le bac. Vénus devrait l’avoir mais avec la perspective d’un troisième trimestre, rien n’est moins sûr…

Normalement, le concours était prévu pour mi-juin, et vers le 25 mars on a eu l’information officielle que le concours était déplacé au 8 juillet. Je me dis que ça peut encore changer. Ma crainte, c’est qu’ils déplacent l’ECN à septembre. Ça nous rajouterait encore deux mois de révisions, sous le soleil, au moment où on devrait pouvoir relâcher la pression. Mentalement, ce serait très compliqué à gérer.

Alors, j’essaie de voir au jour le jour. Et j’espère que tous ces changements ne vont pas remettre en cause toutes les années de travail que j’ai fournies.

 

Marion, 23 ans, étudiante, Besançon

Crédit photo Pexels // CC Retha Ferguson

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