Johanna 28/10/2018

En sixième, j’ai caché mon harcèlement pendant des mois

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Au collège, Johanna a été le bouc émissaire de ses camarades. Par peur de se retrouver seule, elle n'a rien dit, avant de tout avouer à sa mère.

Le harcèlement à l’école, c’est un sujet dont les médias parlent souvent. Moi, je l’ai vécu. J’étais en sixième.

Tout commence en début d’année scolaire… Je ne fais absolument rien de méchant. Je ne me moque de personne. Je ne fais aucune remarque sur les autres. J’aide toujours mes camarades. Mais cela n’empêche pas certains de se moquer de moi et de mon physique. Je suis petite et à l’époque, je suis en surpoids. J’entends des phrases du genre : « On dirait une brioche. » On me surnomme « la baleine » ou « tas de graisse ». Et moi, malgré leurs méchancetés, je reste gentille.

Malgré les moments de rigolade, de gentillesse, de repas partagés, mes amies aussi se servent de moi.

Je suis trop naïve

À l’époque, je suis trop naïve pour m’en rendre compte tout de suite et je deviens comme on dit « leur homme à tout faire ». Je fais leurs devoirs. Je porte leurs affaires. Elles me « rackettent », sans être violente avec moi. Du style : « Est-ce que tu peux me donner ton bracelet ? Si tu dis non, on n’est plus amies ! » J’hésite car c’est précieux à mes yeux, et puis, par peur de me retrouver seule, je donne tout ce que j’ai.

Petit à petit, les choses empirent. Une fois, pendant un cours de sport, mes « amies » me mettent habillée sous la douche dans les vestiaires. Elles me tiennent à plusieurs, me maquillent en classe jusqu’à ce que j’en pleure. Je suis en colère, j’ai un tas d’émotions négatives en moi, mais je suis seule et je n’ai pas la force de les battre. Les profs ne voient rien car tout est fait en toute discrétion. D’autres camarades de classe s’y mettent, certains me poussent pour me faire tomber devant tout le monde. Tous les jours, je vais au collège avec une boule au ventre, me demandant ce qui va m’arriver d’humiliant.

T’es une balance

Tout ça, je le garde pour moi pendant des mois. J’ai peur que ma mère apprenne tout, se rende au collège, et qu’ensuite, mes camarades de classe me disent « t’es une balance » et que la situation empire. Sauf qu’un jour, ma grand-mère sent que je ne vais vraiment pas bien. Elle me demande plusieurs fois : « Ça va ? T’es sûre que tu vas bien ? » Ma mère est là. Et moi, je craque. Je lâche toute la vérité. Je raconte ma situation, comment les autres élèves me traitent. C’est la meilleure décision que je prends.

En arrivant au lycée, Meilo s’est faite harceler. Très vite, elle en paie les conséquences : isolement, mutilation, idées suicidaires, baisse des notes et anorexie mentale. Aujourd’hui, elle va mieux, mais n’attend qu’une chose : avoir le bac et quitter le bahut !

Une jeune fille rousse montre un doigt d'honneur.

Après plusieurs convocations des harceleurs dans le bureau du principal, les élèves de ma classe comprennent leur erreur. Ils se mettent à ma place et se rendent compte qu’ils m’ont fait énormément de mal et qu’ils n’auraient pas du tout aimé que cela leur arrive.

Mon groupe « d’amies » a été exclu du collège durant plusieurs jours. Bien sûr que je me suis retrouvée seule au début, mais je me suis fait de nouvelles amies, petit à petit. Des profs ont mis en place une petite boîte pour écrire des mots et alerter sur d’autres cas de harcèlement, sans forcément en parler oralement. Aujourd’hui, je me suis reconstruite. Je pense un peu plus à moi, je suis la même, en plus méfiante. J’arrive à me faire des ami(e)s, même si je suis moins sociable.

Johanna, 18 ans, étudiante, Paris

Crédit photo © EuropaCorps Television, France 3, TV5 Monde // Marion, 13 ans pour toujours de Bourlem Guerdjou (téléfilm, 2016)

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