Allan G. 27/08/2019

L’université scandinave m’a réconcilié avec les études

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L'université française m'a dégoûté des études. Six mois en Erasmus en Finlande ont suffi à me réconcilier avec l'enseignement supérieur.

Après mon bac ES à Châteauroux, je me suis inscrit en licence de gestion à l’IAE de l’Université de La Rochelle. Deux années plus tard, mon enthousiasme et ma curiosité initiales avaient disparu. Sur les 150 étudiants du départ, nous n’étions plus que 40 survivants de cet « Hunger Game ». Et les profs ne manquaient pas de nous convaincre d’être heureux, fiers d’être (encore) là.

Parmi les moments marquants, je me rappelle d’un prof survolté envers une étudiante en pleurs. Elle était paniquée à l’idée de ne pas réussir à présenter oralement dans une autre langue. D’une amie laissée à son propre sort pour trouver son stage, l’administration refusant d’aider, sous prétexte que ce n’était pas leur problème si elle ne validait pas son année. J’ai même vu une prof refuser d’aider un étudiant avant un examen sous prétexte qu’il était trop tard. Je pensais qu’on serait pris pour des adultes ; l’appel en début de cours, la tolérance zéro pour les absences et le rapport hiérarchique en béton armé ont eu raison de cette fausse promesse.

Malgré le fait d’avoir toujours été supporté par ma famille pour faire un master, cette idée commençait à me décourager. Pourquoi ne pas partir en Erasmus, et finir ma licence là-bas ? Quelques heures après le Nouvel An, j’étais sur le chemin de Lappeenranta, en Finlande, avide de changement, et content de pouvoir vérifier si toutes ces rumeurs à propos de l’éducation scandinave étaient fondées. Après tout, s’il existait un remède à ma perte d’espoir dans l’enseignement supérieur, cela ne pouvait être qu’au Nord, sous la neige, dans le blizzard.

Après six mois à l’université finlandaise, impossible de revenir en France

Ce nouveau système m’a fait découvrir un autre monde. Les profs, détendus et avenants, nous demandaient de les appeler par leur prénom, engageaient avec les étudiants d’égal à égal, apprenaient eux-mêmes. Ils mettaient en place des travaux de groupe dans lesquels ils assumaient un rôle de facilitateur plutôt que de juge, n’hésitaient pas à complimenter le propos ou la question d’un étudiant, soulignaient les forces de chacun. Révolutionnaire, j’ai même cru voir une prof rester avec un étudiant après les cours pour l’aider.

Il est clair qu’être capable de donner autant de soi demande flexibilité et dynamisme, mais le résultat en valait la peine. Les étudiants étaient investis, déterminés, curieux et courageux. Six mois en Finlande ont suffi à effacer une négativité qui s’était accumulée sur plusieurs années, et à guérir ma perte d’espoir.

J’ai donc décidé de poursuivre en master ! Mais seulement dans ces conditions. J’ai renoncé à rentrer en France, au fromage, aux pains au chocolat, à la langue française, à vivre près de ma famille et de mes amis. J’ai soumis mes candidatures auprès de différentes universités, toutes localisées en Scandinavie.

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Quelques mois plus tard, l’université de Göteborg, en Suède, m’accueillait pour un master en business international, une expérience qui a confirmé les découvertes mentionnées plus tôt : engagement des profs, travaux de groupe, encouragements, compliments et critiques constructives… Deux ans plus tard, après beaucoup d’efforts pour apprendre le suédois et m’intégrer, me voilà toujours en Suède, une compagne à mes côtés, et un travail qui m’envoie partout dans le monde en tant que consultant en stratégie d’entreprise, trouvé six mois après obtention du diplôme.

L’ironie de cette histoire est bien que je n’aurais jamais découvert la Finlande et la Suède si la France ne m’avait pas poussé à trouver mieux ailleurs. Pour cela, je devrais être reconnaissant. Mais peut-être que le système éducatif français devrait penser à appliquer l’exemple scandinave au lieu de seulement le citer à répétition.

 

Allan, 26 ans, consultant, Göteborg (Suède)

Crédit photo Unsplash // Shubham Sharan

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