Amir H. 16/09/2018

Sur le papier presque Français

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Je vis depuis cinq ans en France. Petit à petit, je suis devenu Français, dans les faits. Je veux aujourd'hui l'être officiellement.

Le 17 septembre 2018 marquera le cinquième anniversaire de mon arrivée en France. À cette date, je compte déposer un dossier de demande de nationalité française par naturalisation. C’est un moment que j’attends depuis très longtemps, depuis mon premier voyage en France en juillet 2010, grâce une bourse du Consulat général de France à Jérusalem. J’avais 20 ans.
Je me souviens quand je longeais les quais de la Seine de Notre-Dame à la Tour Eiffel, je passais devant le pont Alexandre III et les Invalides et j’ai dit à l’amie qui m’accompagnait : « Un jour j’aimerais vivre ici. » Le rêve est gratuit. Qui aurait imaginé que cela se réaliserait quelques années plus tard, et que j’habiterais près des Invalides que je vois tous les soirs ? La France était un coup de foudre.
On a toujours peur que le coup de foudre passe avec le temps et que l’on se retrouve seul. C’est ce que beaucoup de gens me répliquaient quand ils m’entendaient dire tout l’amour que je ressens pour la France. Mais Dieu merci, cet amour est toujours là.
Maintenant, ma vie est ici en France : mes amis, mon travail et mes activités culturelles et associatives.
Dans le dossier de demande de naturalisation, il y a une partie réservée aux preuves de l’intégration dans la société française.
Je n’ai pas fait d’efforts pour m’intégrer, j’ai juste observé et été porté par cette magnifique aventure de la découverte d’un autre monde. Puis, il y a eu cette passion pour les langues et cultures latines. Cela a été facile. Je ne me suis jamais dit que je voulais être français, je le suis devenu avec le temps, influencé par un mode de vie, une culture et une politique du vivre-ensemble.

En France, j’ai appris à croire en l’Homme

Dans l’entretien de naturalisation, on demande aux étrangers ce qu’ils ont apporté à la France, je n’ai pas de réponse. Par contre, je sais ce que la France m’a apporté par sa culture, sa conscience politique, son ouverture sur le monde et ses idées d’égalité et de fraternité.
J’ai appris à croire en l’Homme, en sa fragilité et sa créativité. J’ai appris à ne jamais justifier l’oppression et à me mettre toujours à la place des autres. J’ai compris que l’Homme ne choisissait jamais son malheur. J’ai appris qu’être gentil ne suffisait pas. J’ai appris qu’on ne vivait pas seulement pour soi et que l’Homme était redevable envers sa société.
J’ai appris à croire en l’État et sa justice et en l’idéal républicain. J’ai appris que le citoyen devait toujours penser à l’intérêt général et être responsable de ses actes.
Je pense que lorsque l’on vit dans un pays par choix et par amour, on doit faire partie de ce pays.
En France, les étrangers ont les mêmes droits que les Français sauf le droit de vote, ce qui m’arrangeait bien pendant cinq ans, car je ne me sentais pas responsable.
Ce n’est pas seulement pour le droit de vote que je demande la nationalité française.
C’est une question d’identité. Alors qu’on parle de cette crise d’identité ou de ce mal d’identité en Europe, moi, j’ai la chance d’avoir une identité, celle d’un Arabe palestinien musulman (tout ce que je n’ai pas choisi) francophone et francophile qui se sent parfaitement Français et Européen.
Si j’avais immigré en Italie ou en Espagne, j’aurais fait la même démarche. Pour moi, c’est important de faire partie du pays dans lequel je vis et vois mon avenir.
Je fais partie des gens très rares qui ont cette chance de pouvoir choisir leur identité.
La nationalité n’est pas un droit. Elle peut être refusée. Mais au moins j’aurais fait mon devoir.

 

Amir, 27 ans, salarié, Paris

Crédit photo Pixabay // CCO Nico_61

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1 réaction

  1. Très beau texte. Je croise les doigts…

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