ZEP 18/12/2013

« Un jour viendra où ta fille prendra son envol »

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À 22 ans, je ne supporte plus le peu de liberté que me laisse ma mère. Incompréhensions, mensonges, tensions à la maison, je n'attends qu'une chose : prendre mon envol.

J’habite chez mes parents depuis toujours, enfin chez ma grand-mère, avec ma mère. Ça a ses avantages mais aussi ses inconvénients. Pour moi, il y a plus d’inconvénients que d’avantages. Ce qui m’attriste le plus, c’est le manque de liberté. Je ne peux pas sortir quand je veux. Quand je ne suis pas rentrée vers 20h30, ma mère m’appelle et me demande ce que je fais. Je dois toujours lui demander la permission avant de sortir. J’ai beau avoir 22 ans, j’ai la liberté d’une ado de 17 ans.

Ce manque de liberté me ronge de l’intérieur. Parfois, je suis même obligée de mentir à ma mère : je lui dis que je vais voir des amies alors qu’en réalité je vois un garçon. Je reste enfermée dans ma chambre quand je ne sors pas. Un jour elle est montée dans ma chambre et elle m’a dit : « Tu fais pas ce que tu veux ici, tant que tu vivras sous mon toit. » Je ne savais pas quoi répondre à ça, j’étais à la fois triste et blessée. Je lui ai répondu : « De toute façon à 25 ans, je pars de chez toi! » Et le pire c’est que c’est vrai : à 25 ans, j’me tire.

J’ai besoin de prendre l’air, de respirer mais ma mère ne le comprend pas. Je pense qu’elle est restée dans l’esprit que certains Musulmans vivent encore chez leurs parents jusqu’à un certain âge, et que leurs enfants ne sortent pas ou très peu. Mais ce n’est plus comme avant : on est en France et pas au bled. Elle m’a raconté un jour qu’à son époque, quand elle avait mon âge, elle travaillait, et s’occupait de ses frères et sœurs et qu’elle ne sortait pas. Elle est restée en cette vieille époque, et ça déteint sur moi.

J’en ai déjà parlé à des amis, et eux me disent de me révolter contre ma mère. Ils n’ont pas tort, mais combien de fois ai-je essayé ? Je lui ai demandé pourquoi je ne pouvais pas avoir plus de liberté, et la réponse que j’ai toujours eu c’est : tu n’as pas d’amis. Après sa réponse, je suis restée bouche-bée.

Moi dans ma tête je me dis : « Un jour viendra où ta fille prendra son envol pour faire sa vie, et tu ne pourras plus rien faire pour l’en empêcher. »

 

Sana, 22 ans, volontaire en service civique, Evry

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