Emeline T. 05/04/2021

Divorce confiné, guerre froide assurée

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Pendant le premier confinement, mes parents ont entamé une procédure de divorce, alors qu'on vivait tous sous le même toit... Un enfer !

Dans le salon, c’est un champ de bataille. Des cris, des attaques fusent des deux côtés. Jour après jour, des embrouilles, des pleurs, des cris, des portes qui claquent. De l’annonce du divorce de mes parents au début du premier confinement jusqu’au départ de mon père, toutes mes journées ont ressemblé à ça.

Depuis quelques années, tout le monde s’attendait à ce divorce, mais rien ne se faisait. L’entente n’était pas au beau fixe, des grosses tensions étaient apparentes entre mes parents. Ce sont des personnes à fort caractère, légèrement grandes gueules. Les embrouilles étaient donc normales chez nous, mais, à l’extérieur, nous étions la petite famille parfaite. Une famille unie, forte, souriante, où tout le monde se comprenait, mais, dès le pas de porte passé, la réalité revenait. Les bombes retenues explosaient.

Un jour, l’annonce tombe : nous allons devoir rester chez nous, entre quatre pauvres murs, pendant une durée indéterminée. Les doutes arrivent : comment ça va se dérouler ? Combien de temps allons-nous devoir rester tous ensemble ? Vont-ils être assez adultes pour ne pas me mêler à leurs problèmes ?

Le no man’s land en personne

Les réponses sont vite arrivées, et pas celles que j’attendais. Ce fut le début d’une longue guerre froide et ce que je craignais arriva : je devins la messagère de mes parents. Chacun me transmettait ses problèmes et je devais en faire part à l’autre. La garde de la chienne a été plus compliquée que ma propre garde, on devait trancher qui allait la garder. J’étais le no man’s land en personne. Je marchais comme sur des mines pour être sûre qu’elles n’exploseraient pas contre moi, afin d’assurer ma tranquillité… si demandée et peu eue.

Chaque prise de parole était analysée, car si je parlais trop à l’un ou à l’autre, je faisais du favoritisme, je n’étais pas une personne de confiance, pas leur alliée… Il y a mieux que de se retrouver tiraillée entre son père et sa mère pour des broutilles qui ne me concernent pas.

Comme les parents d’Emeline, de nombreux couples se sont séparés pendant le confinement. Les spécialistes en droit familial l’ont bien remarqué : le taux de procédures de divorce engagées en 2020 est en forte hausse en France par rapport à l’année précédente.

Ma maison se résumait à deux camps qui défendaient leurs intérêts, tous discutables. Ça devenait quotidien et, confinés, plus moyen d’extérioriser.

Un jour, ce fut un ras-de-bol complet pour tout le monde. Le confinement avait empiré la situation.

Mon armistice à moi ? Partir chez des amis une semaine sur deux

Mon père trouva sa solution : fuir cette maison triste, remplie de haine et laisser derrière lui sa femme et sa fille pour reconstruire sa nouvelle vie, sa nouvelle famille.

Voilà que j’étais enfermée entre ces quatre murs avec ma mère seulement : le lien qui nous unissait, c’était de nous embrouiller pour tout et pour un rien, pour une chaussette qui traîne, pour un mot de trop… Je m’entends encore lui dire : « C’est encore de ta faute ce qui arrive. Regarde, on s’est à nouveau embrouillées, tu en es fière ? » Mon armistice à moi a été de me renfermer sur moi-même et de partir chez des amis une semaine sur deux.

Le confinement a aussi renforcé certains couples. En se confinant avec son crush, Inès est passée de la relation « en période d’essai » à celle en CDI.

Aujourd’hui, voir mon père est un périple. Je dois parfois braver le couvre-feu. Alors on se voit en coup de vent, on s’appelle de temps à autre. Et moi, j’attends une trêve pour souffler.

 

Emeline, 19 ans, étudiante, Corbeil-Essonnes

Crédits photo Pexels // CC cottonbro

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