Cyntia F. 25/09/2018

Nos vêtements dévoilent nos modes de vie

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Du Brésil à la France, j'ai vu ma mère changer ses manières de s’habiller et de prendre soin d'elle à mesure d'un déclassement social. Quand l'habit témoigne et influe sur l'estime de soi...

Face au miroir, dans un ascenseur, ma mère et moi, c’est toujours un moment de confrontation et de comparaison entre notre vie ici, en France et celle d’avant au Brésil. Elle se regarde, examine ses cheveux noirs, lisses et brillants et me demande : « Comment j’ai fait pour en arriver au point de sortir de l’appartement sans me changer ? » Passer de sa cuisine à la rue avec la même chemise et le même jean, lorsque nous étions au Brésil, c’était impensable.

Là-bas, les vêtements rythment ta journée et les grands moments de ta vie. Les habits confortables ou trop vieux, on les met à la maison. Les plus apprêtés, mais qui restent simples, nous les mettons pour aller au supermarché ou se rafraîchir sur le trottoir de la voisine à 17h, moment le moins chaud de la journée. Les vêtements les plus beaux, on les met pour sortir le soir ou aller dans certains centres commerciaux. Plus on s’éloigne de notre cercle quotidien, plus nos vêtements ont comme fonction de créer une magie autour de nous. On avait aussi l’habitude d’aller chaque samedi chez l’esthéticienne pour se faire faire les ongles et se faire épiler. À la maison, on faisait des masques aux fruits. On avait le teint vif et coloré par le soleil. Dans la culture brésilienne, c’est une question de respect de soi, de nourrir son corps par des soins. Tu lui rends hommage et, ainsi, tu te rends hommage. Ta peau, tes cheveux, tes robes sont tes réelles parures.

Les vêtements influent sur la confiance en soi

Ici, en France, on peut porter le même vêtement au travail, à la maison et à un mariage. Il possède toujours ce côté utilitaire car il est là pour te protéger, te couvrir, te rendre respectable, acceptable, crédible. Il traverse toutes les étapes de la journée sans marquer les transitions ou les moments marquants. On se soucie peu de son corps, de sa peau et de ses cheveux. Les moments de lien avec toi-même pendant lesquels tu cultives l’amour de soi sont rares et tu finis par t’oublier dans tes obligations routinières.

Pour ma mère, s’adapter à la manière française de s’habiller, c’est mettre une partie de soi dans un placard poussiéreux pour donner la priorité à ses obligations quotidiennes après un remariage, un bébé et des années de chômage qui l’ont enfermée dans un appartement. Elle a vu sa vie sociale et professionnelle s’anéantir, son temps et son argent – pour prendre un peu de plaisir à s’embellir – se réduire. En observant son changement de style vestimentaire, j’ai compris que les vêtements jouent sur la confiance et l’estime de soi. Cela peut déstabiliser complètement la perception que nous avons de nous-mêmes.

 

Cyntia, 25 ans, étudiante, Trappes

Crédit photo Adobe Stock // © Pavel Bobrovskiy

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