Kismala A. 23/03/2018

Du Soudan à la France… mais toujours ensemble

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Il y a deux ans, pour fuir la guerre au Soudan, j'ai laissé ma famille, direction Paris. Par chance, je n’étais pas seul.

Azam, c’est mon pote du Soudan. Il a 24 ans, je le connais depuis 2013, on habitait dans la même ville : Omdourman, près de la capitale. On est partis en même temps pour venir en France : on voulait prendre des cours de français et trouver du travail. On est allés jusqu’en Libye en voiture. On est restés un an là-bas. Il y avait la guerre, c’était une période difficile. Je travaillais dans un magasin et Azam dans un garage, pour réparer des voitures. On n’avait pas assez d’argent pour continuer le voyage, alors on économisait.

Au bout d’un an, on a payé un voyage jusqu’en Italie. On a traversé la Méditerranée en bateau. On a eu peur : on était vraiment beaucoup sur le bateau et il s’est renversé. On est tous tombés dans l’eau. Nous, on a eu de la chance, on avait des gilets.

On est toujours restés ensemble. Finalement, un autre bateau est venu nous repêcher. On est arrivés en Italie. On est restés deux mois. Là-bas, Azam était malade. Il avait froid, il avait peur. Je suis resté avec lui jusqu’à ce que ça aille mieux, je lui apportais à manger, je parlais aux gens.

Ensuite, on est partis en train jusqu’en France. Azam, c’est la seule personne que je connaissais quand je suis arrivé à Paris. On n’avait pas de logement, mais au moins, on n’était pas seuls. On n’a pas de famille ici.

Ça fait du bien d’avoir un ami. On peut se parler, on se comprend et on parle arabe tous les deux. C’est cool aussi d’avoir de la compagnie pour manger, et on se sent moins seul. On s’est soutenus pour trouver un toit. D’abord, on a passé trois mois dans un hôtel, à la station de métro Pernety, grâce à une association qui aidait les demandeurs d’asile. Mais je ne m’y suis jamais senti chez moi. Les portes fermaient toujours à 22h le soir. Je me suis retrouvé dehors plusieurs fois en rentrant de l’entrainement de foot ou de chez mes amis.

Maintenant, Azam a un appart à Orsay et un travail dans le bâtiment. Moi, j’habite dans un CADA (Centre d’accueil de demandeurs d’asile), ce sont des logements prêtés par l’association France Terre d’Asile vers la Porte de Choisy. On a quatre chambres et un salon, que je partage avec sept autres personnes que je ne connais pas trop. Ça fait deux par chambre.

Là-bas, l’avantage, c’est qu’on peut voir l’assistante sociale et avoir une adresse pour recevoir le courrier, et avancer dans nos démarches pour les papiers. En 2017, j’ai reçu mon titre de séjour pour deux ans.

Maintenant, avec Azam, on se voit le week-end. Lui, il travaille, moi, j’étudie, c’est comme ça. Traverser ces épreuves nous a soudés, il est devenu comme un frère.

 

Kismala, 24 ans, en formation pro, Paris

Crédit Photo U.S. Air Force // Senior Airman Jarad Denton

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