Elodie T. 18/06/2015

Lycéenne en France, on me traite souvent de blédarde…

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« Touche la pas » ou « touche pas la » ? Lycéenne d'origine turque, je fais bien rire ses camarades. Mais je ne perds pas l'espoir d'améliorer mon français pour continuer mes études.

Un jour, j’étais avec des amies, on parlait des choses de la vie, des gens, de ce que l’on pense quoi !…

– Toi Elodie, quand t’es au bled et quand t’es ici, c’est quoi la différence ?

– Quand je suis en France, je me sens anonyme parce qu’il y a trop de monde. Alors qu’en Turquie, c’est comme chez moi, c’est comme la famille, tout le monde se connait, tout le monde se parle, tout ça…

– Ça doit être cool. Pourquoi t’es pas restée là-bas ?

– Mes parents ont voulu rester en France parce que ça changeait beaucoup de choses.

A ce moment-là, j’étais très fière de parler de mon pays et tout à coup, j’avais un peu la haine de ne pas être restée là-bas, parce que là-bas, j’étais bien.

T’aurais mieux fait de rester là-bas parce que ton français… Il est pas top !

Ensuite, on a rigolé, mais le turc, c’est vrai que je le parle couramment. Et puis j’ai de la chance parce qu’au bac, il y a l’option turc. Bref, ensuite, on se chamaille et il y a quelqu’un qui met ma pote par terre.

– Touche pas la ! Je lui dis.

– On dit touche la pas…

Et ils se foutent de moi, ils rigolent mais moi je sais que ça se dit « touche pas la », même mon ancienne prof me l’avait dit. Pour moi, tant qu’on me comprend, le reste je m’en fous et puis je sais qu’ils rigolent quand ils disent ça. Ça me blesse pas, parce que je sais que je peux faire mieux, mais il faut vachement de temps pour que ça s’améliore. Je me mets à réfléchir alors à mon orientation au lycée, car j’ai plusieurs choses en tête. Et puis je pense à des gens vraiment intelligents, plus disciplinés que moi qui disent : « C’est dur, mais il faut s’accrocher », et ça me bloque. Moi, il me faut une éternité pour que ça rentre dans ma tête, pour que je n’oublie pas et parfois, je perds confiance. On me traite souvent de blédarde parce que quand je parle, j’inverse quelques mots, et ça ne change pas. Du coup, en gros, je ne sais jamais ce que je veux faire. Quand on me dit d’écrire un récit, le temps que ça monte au cerveau, que je réfléchisse, c’est vraiment la galère. Je ne sais même pas si ce que j’écris est vraiment ce qu’il faut faire mais bon, comme on dit : « Qui ne tente rien n’a rien. » On dit souvent que je suis bête mais bon, je sais que c’est de la rigolade, et puis j’ai des capacités quand même, dans le travail. Le seul problème, c’est le putain de temps ! Mais bon, je suis fière de moi parce qu’avant c’était pire, c’est-à-dire que j’aimais tellement m’amuser que j’avais du mal à faire des efforts, je laissais vite tomber, alors que là, tout a changé. Même mes parents s’améliorent en français, ça fait plus de dix ans qu’ils sont en France. Ils pourraient faire mieux, mais ils s’en foutent. La seule chose qui compte pour eux, c’est le travail : « Faut travailler ! » C’est leur phrase préférée.

 

Élodie, 16 ans, lycéenne, Le Bourget

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1 réaction

  1. je suis trop contente de voir quelqu’un qui partage la même situation que moi ! franchement ça me fait du bien , moi aussi on me traitait de blédarde, ouai je comprends que ça peut être une façon de rigoler mais c juste c blessant comme si on te met chaque fois un mur devant toi qui t’empêche de t’intégrer parmi les autres et se sentir normale ! et surtout quand tu veux raconter une blague ou dire ton avis par apport â quelque chose et que tu n’arrives pas pcq t’as pas assez de vocabulaire c’est la chose la plus dure que j’ai jamais vecu pcq ca t’empéche d’étre toi et que les gens voient pas qui tu es en vrai !!!.

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