Calvin C. 10/01/2020

Avec ses parents, on n’est pas du même monde

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Entre moi et ma copine ça se passe très bien, mais je ne suis pas au goût de ses parents. Tout ça parce que je viens d'un HLM et que j'ai pas de diplôme...

Parce que je viens de la banlieue de Melun et à cause de notre relation à distance, la famille de ma copine ne m’accepte pas. Ça fait plus d’un an que je suis avec, et tout se passe bien. On s’est rencontrés sur un forum qui s’appelle Discord en juin 2018, on s’est tout de suite bien entendus, on a vite appris à se connaître, puis on s’est mis en couple.

On vient de deux mondes différents. Elle d’un milieu rural avec une culture basée sur la vigne et le champagne, et moi d’un milieu urbain basé sur la diversité culturelle. J’ai grandi dans un HLM dans la commune du Mée-sur-Seine dans le sud de la Seine-et-Marne, en Île-de-France, dans les alentours de Melun. Ma copine habite Reims et ses parents dans un village dans les alentours, Boursaud, dans une maison de campagne gigantesque. Tu t’y perds si tu ne connais pas.

Pour eux, le Mée c’est la banlieue de Paris, car ils n’en avaient jamais entendu parler avant. De ce que m’a dit ma copine, pour eux, je suis l’image du jeune de cité qui n’a pas d’avenir, en décrochage scolaire, qui se drogue et fait de l’argent sale en réglant tous ses problèmes par la violence… alors que je vis dans un quartier plutôt tranquille. Tout ça car ils ne sont pas habitués à voir des HLM et une diversité culturelle avec des langages variés. Il y en a beaucoup moins chez eux, dans leur petit village. Je trouve ça injustifié et idiot de juger les gens à leur situation sociale et par rapport au lieu où ils vivent.

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Je n’ai pas réussi à avoir mon bac : je suis un peu comme mon père, autodidacte, c’est pour ça que je n’ai pas accroché à l’école et que j’ai préféré faire des formations de croupier casino, et depuis plus de deux ans, je suis en réorientation professionnelle pour être animateur périscolaire. Quant à elle, elle a suivi un cursus S et a eu son bac, elle a fait sa première année de médecine et maintenant, elle est en formation de manipulatrice radio en hôpital. Mes parents sont dans la classe moyenne : mon père est intermittent du spectacle et ma mère travaille dans un service administratif dans une boîte sur Paris. Et ceux de ma copine gagnent bien leur vie, avec une éducation stricte. Ils ont toujours voulu le meilleur pour elle. Rien que pour cela, je suis victime de préjugés idiots et sans aucun sens.

« Il va profiter de ton argent et de ta voiture »

La première fois que j’ai été invité chez eux, je me suis présenté de façon naturelle et ils ne m’ont rien dit. Ils étaient plutôt accueillants, on discutait bien, j’étais à l’aise, et je commençais à les apprécier. Après mon retour chez moi, elle m’a raconté que ses parents avaient été affligés de me voir. Son père était choqué que je ne sache pas servir le champagne… « Mon père a pas apprécié que tu te serves sans demander et de la mauvaise façon. » Et sa mère me trouvait trop intrusif alors que ma copine me faisait visiter leur maison : « Ma mère te trouvait trop collé à moi à me suivre partout dans la maison. »

C’est difficile à supporter, à la fois pour ma copine car elle est triste de voir que ses parents ne font pas d’efforts pour m’accepter et accepter ses propres choix, et pour moi. Ça me met mal à l’aise, car je sais que malgré mes efforts pour me faire accepter, ils préféreront toujours un médecin fortuné pour assurer la sécurité de leur fille qu’un animateur modeste qui l’aime pour ce qu’elle est et qui la rend heureuse ; malgré les difficultés et le long trajet qui nous sépare. « Il a pas de diplôme, il est en formation pour faire de l’animation, et il a pas de permis… Il va profiter de ton argent et de ta voiture. Alors que si tu te maries à un médecin, ce serait lui qui prendrait soin de toi et pas l’inverse. » C’est la première phrase qu’a dit sa mère à ma copine quand elle m’a vu pour la première fois. Ça peut se comprendre car sa mère est haut-placée dans une entreprise immobilière et son père expert-comptable à la douane, en plus d’être dans une coopérative de champagne.

Pour la famille de Chaïma, il est normal que l’homme de sa vie réponde à leurs critères. Elle se sent sous contrôle, et aimerait pouvoir faire son choix librement : « Je ne me sens pas libre d’aimer qui je veux, merci la famille ! »

Je fais tout pour les comprendre. Leur culture est juste superbe : la culture de la vigne, leur gâteau de Reims, les monuments aussi… J’aime tout ce qu’il y a dans la région de ma copine. On arrive à avoir un échange culturel merveilleux, car elle me montre que même si les gens sont parfois pas sympas, les monuments et la nourriture valent le coup. Et moi, je lui montre que les gens qu’il y a chez moi sont plus respectueux et altruistes qu’on l’imagine.

Sauf que ça ne se passe pas comme ça pour l’entourage de ma copine. Ils veulent m’effacer de sa vie. Chaque fois qu’elle va quelque part, ils veulent qu’elle parle à d’autres garçons dans l’espoir qu’elle tombe amoureuse d’un autre. Alors qu’elle n’en a pas envie et qu’elle est convaincue que je suis la personne qu’il lui faut.

Calvin, 20 ans, stagiaire, Le Mée-sur-Seine

Crédit photo Unsplash // CC Blake Carpenter

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