Camille G. 04/03/2021

4/5 Mon coming-out grâce à mon crop top

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En portant des crop tops, Camille a réussi à faire son coming-out auprès des élèves de son lycée. Des vêtements qu’iel laisse au placard une fois rentré·e à la maison.

Je me souviens de la première fois que j’ai porté un crop top, au début de mon année de seconde. Avec mon t-shirt, j’ai fait un nœud et j’ai essayé de le mettre en évidence pour que les gens remarquent que je peux aussi être une fille. Dès que je l’ai fait, je me suis senti·e gêné·e et des personnes m’ont lancé des regards pas très rassurants. Certain·es m’ont demandé pourquoi je portais ça, mais sans avoir de mauvaises intentions donc ça m’a rassuré·e. Ensuite, je suis allé·e voir mes ami·es pour leur montrer, et au début ils·elles ont trouvé ça bizarre.

Je leur avais déjà dit que j’étais queer, mais pour moi, mon coming-out s’est vraiment concrétisé ce jour-là. Au début, mes ami·es ont un peu rigolé, mais ce n’est pas grave et je les comprends : ça fait plusieurs années que je les connais et c’est la première fois qu’ils·elles me voyaient comme ça. Mais ils·elles se sont habitué·es et, au fur et à mesure, je me suis habitué·e moi-même. Et personne ne m’a jamais embêté·e avec ça.

« Are you for the crop top movement ? »

Beaucoup de personnes ont trouvé que c’était bien ce que je faisais. Cela voulait dire que je m’assumais tel·le que je suis. Une seule professeure a réagi : ma prof d’anglais. Elle m’a vu·e avec et m’a demandé en anglais, de manière enthousiaste : « Camille, are you for the crop top movement ? » Ce qui veut dire : « Camille, es-tu pour le mouvement du crop top ? » Je lui ai dit que oui, et que j’avais aussi des raisons personnelles d’en porter.

Les jours où je mettais des crop tops, je cachais ma tenue sous mon sweat pour que mon père ne la remarque pas. Puis, en début d’après-midi au lycée, j’enlevais mon sweat et je ressentais alors un sentiment de liberté. Par contre, en rentrant chez moi, dans le bus, je défaisais de nouveau le nœud de mon t-shirt car je ne voulais pas que mon père ni mon frère ne me voient comme ça.

Je suis bisexuel·le et bigenre

Je vis chez mon père en semaine et, le connaissant, je peux m’attendre à plusieurs réactions de sa part, y compris le dégoût ou la moquerie, et c’est ce qui m’effraie le plus… Car je l’ai déjà entendu tenir beaucoup de propos homophobes, et dire des mots comme « PD » ou « tapette » pour définir les gays. Donc j’ai répété ce même scénario tous les jours jusqu’à l’arrivée de l’hiver. Avec le froid, pas de crop tops, je me contente de joggings moulants et de jeans slim.

La communauté LGBT+ compte plus de 90 orientations sexuelles et identités de genre. Moi, je suis bisexuel·le et bigenre. Quand on est LGBT+, dans l’adolescence, il est difficile d’en parler, surtout à nos parents ou à nos grands-parents, car certains trouvent ces orientations et identités « illogiques ». Mes parents ne sont plus très jeunes malheureusement, donc j’essaie de me cacher au maximum quand je porte des crop tops ou des habits féminisés. Leur réaction m’effraie. C’est sûrement pour ça que beaucoup d’adolescent·es attendent leur 17 ou 18 ans avant d’annoncer leur orientation à leurs parents.

Série 4/5  – Raphaël a dépassé ses complexes en jouant avec les vêtements de sa sœur et un peu de maquillage. Depuis, il « brille ».

Capture d'écran du cinquième épisode de la série, écrit par Raphaël P. : "Me saper pour mieux m'accepter".

En ce qui concerne mes parents et mon coming-out : comment je vais leur dire qui je suis véritablement… ? Je préfère ne pas me poser la question pour l’instant et attendre le bon moment pour le dire, tout simplement. Heureusement, j’ai beaucoup d’ami·es qui m’acceptent comme je suis et me soutiennent, même si cela ne m’a pas empêché·e de subir des regards de travers de la part d’autres personnes.

À ceux·celles dans mon cas qui n’osent pas parler, essayez de vous assumer tel·les que vous êtes, de ne pas avoir peur des réactions des gens et parlez-en surtout à vos ami·es, c’est très important. Et peut-être qu’un jour vous serez enfin prêt·es à en parler à vos parents.

Camille, 14 ans, lycéen·ne, Gardanne

Illustration © Merieme Mesfioui (@durga.maya)

 

L’adolescence en sons et en images

Pour traverser l’adolescence ou se replonger dedans, voici une courte série de recommandations de choses à voir, lire ou écouter :

 

• PODCAST – Entre de Louie Media

Dans ce podcast en trois saisons, de jeunes ados racontent cette période qu’elles et ils traversent, entre l’enfance et l’âge adulte. L’école, l’amitié, la puberté, les parents, l’amour… tous les pans de leurs vies sont passés au crible. La dernière saison interroge dix jeunes garçons d’horizons différents pour tenter de répondre à la question : « C’est quoi être un garçon en 2022 ? »

 

• FILM – Tomboy de Céline Sciamma

Laure est une jeune fille de 10 ans, perçue comme un « garçon manqué ». Arrivée dans une nouvelle école, elle décide de se présenter comme un garçon à une élève et essaie de garder tant bien que mal son secret pour que son identité ne soit pas révélée. Un long-métrage sensible sur la construction du genre à l’adolescence et sur la transidentité.

 

• BD – Les cahiers d’Esther de Riad Sattouf

En sept tomes, Riad Sattouf retrace le quotidien du personnage d’Esther, une jeune fille drôle et pleine de vie, de ses 10 à ses 16 ans. En attendant de les lire, les deux premiers albums ont également été adaptés en vidéos animées et sont disponibles gratuitement sur la chaîne Youtube Les cahiers d’Esther.

 

• DOCUMENTAIRE – Adolescentes de Sébastien Lifshitz

Pendant cinq ans, le réalisateur a suivi deux amies, aux milieux sociaux et aux trajectoires différentes, sur leur chemin vers la vie d’adulte. On découvre ce qu’elles sont devenues à 18 ans, à l’échelle de leur vie et de leur relation. Et on se replonge dans les moments forts qui ont traversé le pays depuis 2015.

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