Marion C. 21/03/2018

Sweat à capuche, mon style n’a pas plu aux recruteurs

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Un entretien d'embauche, c'est une question de compétences, mais aussi d'attitude et d'apparence. J'en ai fait les frais en postulant dans un musée parisien.

Il y a quelques jours, j’ai postulé à une offre d’emploi pour travailler dans un célèbre musée parisien. Dès le lendemain, une des managers me téléphone et me donne rendez-vous deux heures plus tard au musée pour un entretien.

Joie. Excitation. Quelle réactivité de leur part ! C’est qu’ils ont vraiment besoin de gens ! Comment vais-je m’habiller ? Je réfléchis et demande conseil à ma compagne. Une jupe et des collants ? Non, la jupe est passée. Les collants tombent. Mon autre jupe ? Non, toujours pareil. Pas de collants potables. Je me décide à porter une combinaison noire achetée récemment. La couleur du vêtement n’est pas terne. Il y a un effet bouffant au niveau des hanches. Elle est plutôt classe cette combi en fait ! Je ne l’ai pas achetée très cher parce que je n’achète aucun vêtement cher. Je finis ma tenue avec la dernière paire de chaussures que je me suis achetée. Des chaussures de ville assez banales, noires. Il ne fait pas très froid donc un sweat à capuche suffira.

Elles me disent qu’elles me contacteront rapidement.

Me voilà donc partie. J’arrive en avance. Une employée souriante vient me chercher et m’installe dans un petit bureau. J’enlève mon pull. Je me tiens assise bien droite en attendant qu’on s’occupe de moi. Deux managers s’installent dans la salle, accompagnées d’une employée qui va illustrer leurs propos, en montrant, par exemple, ce qu’il ne faut pas faire en salle. L’entretien se passe bien. On rigole ! Elles testent mon niveau en anglais et en espagnol. Je leur dis que je suis sérieuse et précise dans ce que je fais. Comme défauts, je parle du fait que je travaille pour sourire le plus possible et que je manque d’expérience professionnelle.

L’une d’elles me tend une tablette et nous faisons un petit jeu de rôle où je dois jouer à l’enquêtrice. Et l’employée une visiteuse du musée. Je passe le test. Je souris et je ris même. Elles m’expliquent les modalités du contrat. Je les écoute sérieusement me parler des horaires, des pauses, du polo qu’ils nous fournissent et du fait qu’on doit venir en pantalon noir et chaussures noires de ville. Tout me convient. L’entretien se termine. Elles me disent qu’elles me contacteront rapidement.

De la déception à la colère

Le lendemain après-midi, je n’ai pas de nouvelles et je me doute que je n’ai pas été prise. Une pote qui travaille là-bas me le confirme. Elle me dit que les managers ont trouvé que je ne souriais pas assez et qu’ils n’ont pas aimé ma tenue vestimentaire. Elle précise qu’elles n’ont pas aimé le sweat à capuche.

Je ne souriais pas assez. Alors qu’on a rigolé ensemble et que j’ai eu la naïveté de les trouver sympathiques. Leurs sourires étaient en fait froids. Moi, je ne sais pas être professionnelle. Et le sweat à capuche ? Que dire ? Je n’ai rien d’autre à me mettre. Sinon, quand il fait plus froid, je mets mon manteau qui tient vraiment très chaud. J’ai des pulls normaux. À capuche, car c’est très utile. Pas chers. Parce que devinez quoi ? Je ne suis pas une bourgeoise. Et  je ne veux pas prétendre en être une pour être embauchable. De toute façon, les bourgeoises ne répondent pas à des offres d’emploi pour des contrats de quatre semaines payées au SMIC.

Ce que je veux vraiment dire c’est que mon sweat à capuche est politique. Il est politique parce qu’il est qui je suis. Une ex-enfant pauvre devenue une adulte mieux lotie. Par chance. C’est un vêtement. Un bout de tissu. Qu’ont-elles bien pu déduire de ce bout de tissu qui couvre mon corps quand il fait froid ? Que déduisent-elles de l’apparence vestimentaire de quelqu’un ? Que déduisons-nous tous de l’apparence des gens ? Moi je suis arrivée honnête, et naïve. Je suis entrée dans leur bureau en souriant. J’avais besoin de travail. Elles, elles n’ont pas aimé mon sweat à capuche. Elles ont le privilège de pouvoir s’arrêter à ça. Next.

J’aimerais qu’on me traite bien et qu’on me juge sur mes actions

Que va t-on encore me dire ? Mais tu crois que c’est le monde des Bisounours ? Évidemment qu’il faut bien se saper pendant un entretien et sourire en mode nunuche pour paraître la plus docile possible ! Et bien moi j’aimerais vivre dans le monde des Bisounours. J’aimerais qu’on me traite bien et qu’on me juge sur mes actions, mon sérieux, mon intelligence, et tout ce que je peux apporter de bien aux autres, plutôt que sur un sweat à capuche. Moi, je sais que je suis avenante, motivée et joyeuse. Je suis une jeune femme profondément heureuse, mais j’oublie trop souvent que ce n’est pas ce qu’on entend par « personne souriante ».

Hawa aussi a connu des entretiens d’embauches… Et ça a souvent été la même rengaine : De l’art (si peu original) des entretiens d’embauche !

 

Finalement, une des managers se décide quand même à m’appeler pour me dire que plein de candidats s’étaient présentés et qu’ils avaient été meilleurs que moi. Elle a l’audace de me souhaiter bonne chance pour la suite. J’aurais aimé avoir eu la chance de ne jamais croiser sa route et de ne m’être jamais rappelée à quel point ce monde est à vomir.

 

Marion Cécile, 22 ans, étudiante, Paris

Crédit photo © Bays & Thomas Productions // How I met Your Mother (Série TV)

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6 réactions

  1. Même en faisant un effort vestimentaire, en montrant sa motivation, son envie terrible de travailler pour la 1ère fois de sa vie, lors d’entretiens n’y change absolument rien ! Ils prennent des gens avec une belle gueule, des diplômes et ceux qui ont déjà travaillé et qui ont de l’expérience; tous les autres, peuvent se creuser un trou pour s’y enterrer, puisque personne ne vous donne cette fameuse CHANCE de gagné de l’expérience, donc, ne vous étonnez pas que nous, les jeunes, ont gueulent !!!

  2. Être quelqu’un de bien, d’intelligent, d’accueillant, motivé, etc. ne garantit pas d’être embauché. Les autres candidats, ceux qui ont été pris, l’étaient sûrement aussi.
    Il a fallu départager. Pourquoi eux ? Pourquoi pas vous ?
    Ce n’est pas injuste dans le sens où, s’ils vous avaient choisie vous, en quoi serait-ce plus juste pour les autres ? Eux aussi ont besoin d’un travail.
    Il faut bien penser qu’un “échec” à un entretien n’est pas un jugement de valeur, et ne pas se sentir rejeté pour ce que l’on est.
    Ce que vous êtes vraiment, vous, les recruteurs n’y ont pas accès.
    Il faut accepter que c’est un jeu (social) et dans tous les jeux, il y a des règles. Faire un effort vestimentaire prouve que vous prenez à coeur cet entretien. C’est ça le message que vous faites passer.
    Et non, votre identité ne se résume pas à un sweat à capuche. Je suis sûre que vous êtes beaucoup plus que cela ! Vous pouvez tout à fait rester vous-même, tout en acceptant certaines règles.

  3. J’ai bien ri, merci !

    Faites un article sur une mosquée qui t’a interdit d’entrer en string : après tout la seule foi compte ?

    Une entreprise, une mosquée, un parlement… sont des institutions avec des règles : tu veux y entrer tu t’y plies.

  4. Bonjour Marion Cécile,
    D’abord, je suis désolée que vous n’ayez pas été retenue pour ce poste qui visiblement vous intéressait vraiment.
    Vous avez raison, il serait bien de pouvoir être jugée sur ses actes, ses valeurs, … Mais un entretien de recrutement ne permet pas de le faire puisque ce n’est pas en si peu de temps que l’on peut connaître un candidat. Il implique de donner une chance à quelqu’un.
    Si les pratiques sont certainement trop abruptes, la tenue que vous adoptez lors d’un entretien donne un indice sur votre capacité à adopter les codes de l’entreprise dans laquelle vous postulez, y compris les codes vestimentaires.
    Je ne dis pas que c’est juste, mais le recruteur a une demi-heure ou une heure pour évaluer si un candidat qu’il ne connaît pas peut convenir parmi les 100 CV qu’il reçoit… Et parfois il base ses choix sur ce type de critères, ou en tout cas sur ceux qui permettent une évaluation immédiate.

  5. Sincèrement, je viens de lire votre article, je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous.
    Je viens de la banlieue et bien sur que entre une paire de Air max et un bon jogging à une jupe je préfère nettement l’option 1.
    Mais un moment donner quand on va chercher du travail, on débaque pas avec un sweat à capuche.

    Je vois faut mettre une jupe mais pas du tout vous pouvez être habiller le plus simplement possible, une tunique et un pantalon voir un jean sombre, c’est bon pas besoin de se prendre la tête !
    Mais un sweat a capuche y’a pas mort d’homme, c’est vrai mais quand on va postuler à un entretien et en plus dans un Musée et en plus à Paris… ville du ma tu VU !
    Oui effectivement je pense que vous vivez dans un monde de Bisounournours, parce-que la société est bien trop cruelle que les dictat de la mode et de l’apparence font partis de cette vie et surtout ne soyez pas choquer des faux sourire de la part des recruteurs le monde du travail fonctionne comme cela .
    Je mettrais ça sur le compte de votre manque d’expérience mais ne soyez pas surprise que l’on vous juge sur votre apparence certain métier demande une rigueur esthétique.
    J’aurais préféré que l’on nous juge que sur nos capacités que sur notre style vestimentaire mais malheureusement, c’est comme cela que sa se passe en France, j’ai eu aussi à faire à des recruteurs qui mon dévisager pour une paire de basket… donc je sais de quoi je parle, j’ai longtemps refuser d’ adopter la tenue trop pros.
    L’idéal, c’est de rester vous même mais d’être plus soigner lors d’un entretien d’avoir les codes (chemise, chaussure de ville, pantalons sombre) voila ne vous décourager pas est rester forte pour le prochain entretien vous serait que l’on ne vous juge pas que sur votre expérience mais l’apparence ” malheuresement”…..
    Un échec, toujours une leçon !

  6. Salut Marion Cécile, je suis tout-a-fait d’accord avec toi ! Pour moi, j’ai eue 1 entretien (Animatrice en ayant mon Bafa), pour le coup je déteste les jupes, et je m’était habillée chemise blanche, veste noire et jean noir + baskets et sans casquette (les ballerines je les sors qu’une fois
    par an ^^”). Mais, même en ayant montré ma détermination, mon envie de travailler (car je n’ai jamais travailler, et j’ai bientôt 26 ans), tout en m’intéressant au métier, tout en souriant; eux, tout ce qui j’ai rencontré ne ce sont même pas donné la peine de me rappeler, ni de m’envoyer un mail ou courrier postal (et même en les ayant rappelés moi-même). Au final, les diplômes ne servent pas a grand chose, même en ayant le bafa (sans qu’on me laisse l’opportunité de me faire une première expérience),je n’ai pu ddécroché un job quelconque. Alors que d’autres, qui ne roulait pas sur l’or, n’avait pas le diplôme, et se fringuer veste, sweat capuche, jean/baskets sans aucune expériences, ont décroché un CDD puis CDI direct !). A croire qu’ils faut avoir un corps de rêve, être richounet jusqu’aux orteils pour se faire embaucher ! Notre monde est basé que sur l’apparence physique; d’autant plus que les gens en général (et j’en fais les frais depuis toujours) ne juge que par ma façon dont tu t’habille et par ta tête, tu leurs plaît pas, tu n’ai pas intéressante (alors que tu peux être le cousin d’Einstein ou avoir des capacités/valeurs et ouverture d’esprit qui ont du sens avec une intelligence intéressante) c’est pareil, si le physique passe pas, t’es rejeté par la terre entière (inconnu, professionnel et relations privés). Je suis contente de partager cet opinion avec toi sur ta publication, car très peu de personnes (dont j’ai pu constater dans la vie de tous les jours) partage cette même optiqur.

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