ZEP 17/02/2019

L’armée pour fuir la Réunion, pour une nouvelle vie !

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Depuis l'île de la Réunion, Cédryc voyait la France métropolitaine comme un eldorado. L'armée lui a permis de le rejoindre, et c'est aujourd'hui à Paris qu'il compte faire sa vie.

« La température au sol est de cinq degrés », annonce l’hôtesse de l’air. Avec mon petit pull, j’me dis que ça y est : c’est parti pour l’aventure. Dans l’avion qui nous mène de Saint-Denis à Paris, on est une vingtaine de jeunes réunionnais. On a tous décidé de s’engager dans l’armée de terre française. On est tout un groupe, mais dans ma tête, j’arrive à Paris tout seul. Le 1er décembre 2015, j’ai quitté mon île pour une nouvelle vie en métropole.

Là-bas, à l’île de La Réunion, c’était la mer, la plage, le soleil. J’habitais à Saint-Pierre, une ville chaleureuse et paisible au sud de la Réunion avec ma mère et mes frères. J’étais tous les jours en mode décontracte : savates, short, tee-shirt. Mais malgré ça, je ne m’y plaisais pas, parce que la vie y est beaucoup plus chère qu’en métropole : le carburant, la nourriture, le loyer… Mon paquet de biscuits Pim’s à l’orange coûtait 2,70 euros à la Réunion, alors qu’il est à 60 centimes en métropole ! En plus, niveau boulot sur mon île, ça marche que par pistonnage, et pour les formations et leur financement, il y a peu d’aides et pas de suivi pour les jeunes. La France métropolitaine accorde un certain budget pour les jeunes aux agences de formation (le Pôle Emploi et les missions locales), mais j’ai l’impression qu’on sait pas où il va. Aucune formation n’est gratuite à la Réunion. À la Réunion, on est laissé à l’abandon, triste réalité. J’ai l’impression qu’on nous laisse crever !

En regardant les actualités en métropole, j’avais cette vision d’un « eldorado ». Quand t’es en France, t’as beaucoup plus accès aux autres pays d’Europe pour voyager, et j’avais envie de voir de nouvelles choses. Une amie avait économisé plus de 10 000 € avec sa famille juste pour partir en Espagne une semaine ! Je me disais : soit tu stagnes, tu restes là dans ta merde, soit tu décides de prendre ton courage à deux mains et de foncer ! Alors j’ai foncé.

Aujourd’hui, je peux me focaliser sur mes projets 

J’ai donc décidé de fuir mon île en utilisant comme prétexte de m’engager dans l’armée de terre pour un contrat de cinq ans. Au final, j’ai fait l’armée pendant un an et demi. J’ai testé, j’ai bien aimé, mais je suis pas resté : cela me demandait trop de temps et les gradés lançaient des pics à tous ceux qui étaient de couleur. J’ai trouvé à Foix, là où vivait mon papi, une formation pour devenir moniteur d’auto-école financée par la mission locale. Finalement, je ne l’ai pas faite, car je ne me plaisais pas dans la ville et que je n’arrivais pas à trouver ma place dans ma famille par alliance qui vivait dans le même coin. Mais ici au moins, on finance les formations !  

Le 10 septembre 2018, je me suis installé à Paris, et j’ai eu l’impression de commencer enfin ma vraie nouvelle vie. Depuis que je suis en métropole, ce que j’ai vécu a conforté la vision que j’en avais avant de venir et aujourd’hui, je peux enfin me focaliser sur mes projets professionnels et personnels. Ma tante qui travaille à Pôle Emploi me soutient, je suis suivi par la mission locale de Marne-au-Bois et je projette de partir bientôt en voyage en Angleterre. Quand j’aurais trouvé du travail bien sûr !

Cédryc, 21 ans, en recherche d’emploi, Neuilly-sur-Marne

Crédit Photo Unsplash // CC Fabien Maurin

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