Hugo E. 06/10/2017

Provincial, j’ai vécu le stress de passer un concours à Paris

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Passer un concours, c'est déjà stressant. Alors pour moi, débarquer d'Avignon pour me retrouver seul au milieu des autres candidats, dans une ville inconnue, c'était carrément l'angoisse...

8h30, un samedi de mars dans le 14e arrondissement de Paris. Désorienté, stressé, en retard : trente minutes avant la première épreuve du concours de La Fémis, je ne sais plus où aller. Après m’être arrêté au mauvais arrêt de bus, je consulte mon GPS, mais je confonds les rues, les bâtiments et les gens.

Je remarque un attroupement de jeunes qui attendent à l’entrée d’une école. Dans la file d’attente, je coupe la musique de mes écouteurs et j’écoute les discussions. Je me rends vite compte que ce n’est pas mon concours mais un examen de lycéens ! Inquiet, je fais demi-tour. Après une dizaine de minutes de marche accélérée je retrouve avec soulagement une autre masse d’étudiants. Ouf, ils patientent au bon numéro de rue devant le grand bâtiment de l’université Panthéon-Assas.

Second concours à Paris, la routine ?

Dans la file d’attente pour accéder à l’amphithéâtre, je me retrouve face à ma solitude : celle du provincial devant les groupes d’étudiants parisiens décontractés. Ils viennent passer ensemble cette épreuve en souriant et en rigolant. Des centaines de personnes sont là, apportant les dernières touches à leur dossier, échangeant scotch, ciseaux, stylos et enveloppes.

Quatre ans auparavant, âgé de 16 ans et accompagné par ma mère, j’avais déjà passé (et raté) un concours à Paris. C’était pour entrer à Sciences Po. Je me souviens de l’immense halle. 6000 personnes, et autant de tables et de chaises qui m’ont fait me sentir isolé toute la journée.

À la Fémis, il y a six fois moins de candidats et une configuration en amphi sur des bancs étroits. Habitué des partiels dans ce type de salle, déconcentré et stressé par le bruit de centaines de stylos, je m’équipe de bouchons d’oreille pour être tranquille.

Se préparer, c’est déjà une épreuve

Pour Sciences Po comme pour la Fémis, l’entraide entre amis ou inconnus cache une forte concurrence. Ce matin de mars, j’y suis confronté directement. J’observe pour la première fois les visages de chacun des prétendants aux si chères places du concours de l’école de cinéma. Hypersélectif (40 admis sur 1000 candidats). La première étape consiste à préparer un dossier d’enquête (textes et photographies, réalisés chez soi sur un mois et sur un thème donné) et à passer une épreuve écrite d’analyse de film.

J’ai monté mon dossier dans la précipitation jusqu’à la dernière soirée.

Cinq semaines, ça passe vite quand on doit remplir (en parallèle de mes études en sciences sociales) 30 pages, originales, bien écrites, bien illustrées et sur un sujet pertinent.

Le concours étant tôt le matin, j’ai pris un train depuis Lyon la veille. Ensuite, j’ai rejoint en métro et en bus un appartement loué sur Airbnb, à défaut d’avoir un proche pouvant m’héberger ni d’hôtel à prix raisonnable. Le trajet de quatre heures avec ma petite valise et mon sac à dos n’ont pas été très éprouvants. J’en ai profité pour finir le dossier.

J’étais toujours seul dans ma galère, mais eux aussi

Dans mon « nouveau » quartier, j’ai cherché un moyen d’imprimer mon dossier. Cela représente une autre galère pour le provincial que je suis : anticiper pour trouver une imprimerie pas trop chère et ouverte tard. Le vendredi à 17h40, mon dossier terminé dix minutes plus tôt sous le bras, je me suis rendu dans une imprimerie repérée en milieu d’après-midi. Je suis alors tombé sur deux autres personnes imprimant le leur à la dernière minute pour le concours. Ils étaient visiblement stressés comme moi… Ce qui est paradoxalement rassurant : j’étais toujours seul dans ma galère, mais eux aussi, au même moment et au même endroit.

N’ayant dormi que trois heures les deux nuits précédentes, je me suis effondré ensuite dans ma chambre et endormi aux alentours de 21h. Je n’oublie pas de régler le réveil tôt – un autre rappel à gérer. Mon esprit était occupé par l’épreuve, déjà révisée pendant des mois, sans trop savoir comment optimiser les dernières minutes de préparation.

Le jour de l’épreuve, je dois écrire six pages à partir d’un extrait d’un film vu deux fois et que je ne connais pas à l’avance. Ma copie doit être assez intéressante pour un correcteur qui voit passer 300 à 600 pages sur le même petit extrait.

Épreuve éclair, longue attente

J’ai appris à regarder un film avec un carnet de notes et un stylo dans les mains pour décrire et analyser le sens des images et des sons. Mais le concours, c’est encore un autre défi ! Regarder l’extrait du film du bout d’un amphi (arriver dans les derniers signifie avoir une place loin de l’écran), plongé dans le noir total pour écrire pendant la projection, peu de temps entre les deux extraits, aucun ami sur place pour déstresser avant et débriefer après. J’ai beau être habitué à passer des examens toute l’année ou m’être préparé à écrire sur un film. Toutes ces contraintes pratiques et le stress accumulé m’ont déstabilisé la première heure de l’examen.

Malgré le soulagement de la fin de l’épreuve, le concours n’est vraiment sorti de ma tête que bien plus tard.

Elliot nous avait déjà parlé des concours après avoir vu le film de Claire Simon. Et son article est très critique !

Un mois et demi après l’épreuve : je rafraichis déjà la page des résultats depuis deux heures. Je découvre alors que ne suis pas sur la liste des 25% de personnes retenues. Fatalement, je suis déçu de ma performance. Je suis de nature optimiste et je pensais avoir quand même réussi les épreuves. En même temps, je suis immédiatement soulagé d’en avoir fini avec le stress du concours. Avec l’angoisse de la préparation aux résultats en passant par les différentes étapes de l’épreuve.

Et pourtant, aujourd’hui, je réfléchis à me replonger dans ce cycle intense pour repasser le concours de la Fémis… Cette fois-ci, en ayant emménagé à Paris et fort de l’expérience (difficile) de cette première tentative échouée.

 

Hugo, 21 ans, étudiant, Paris

Crédit photo CC Ecole Polytechnique Université Paris-Saclay// Flickr

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